TENUE ■ Ce matin, Haruno s'était levée en ressentant l'excitation que seul un voyage dans un tout autre continent vous procurait. La destination ? Le Mexique. Les tacos, les fajitas l'attendaient déjà et elle en salivait rien que d'y penser. Sa valise était bouclée, il ne lui restait plus qu'à comblé son sac de voyage avec les dernières petites choses à prendre. Etant donnée qu'il allait certainement faire chaud là bas -c'était le Mexique après tout et qui dit Mexique dit soleil-, elle prépara toute sorte de produit pour protéger sa peau d'éventuel coup de soleil. Elle embarqua également des maillots qu'elle avait acheté la semaine dernière à l'intention de ce voyage avec Kô.

Effectivement, ce voyage, elle n'allait pas l'entreprendre toute seule. D'ailleurs, c'était le charmant Kô qui lui avait proposé de se rendre dans ce pays dont elle ignorait tout. Elle avait tout de même tenté d'y apprendre la langue, et avait acheté un petit livre avec des expressions espagnoles pour l'aider. Elle comptait bien en mettre plein les yeux à Kô.

Comme prévu, la jeune fille se rendit à l'aéroport de Narita, là où ils avaient décidé de se rejoindre. Elle s'était assurée d'arriver tôt, comme si son impatience grandissante allait rapprocher l'heure du vol. Malheureusement, ce ne fut pas le cas et elle fut obligé d'attendre bêtement l'arrivée de son compagnon de vol, qui elle espérait, n'allait plus tarder.  

Quelques minutes passèrent, de longues minutes avant que la petite Kamiya n'aperçoive au loin celui qu'elle attendait. Même si elle avait prévu de faire un peu la tête pour lui faire comprendre qu'elle s'était ennuyé à mourir en l'attendant, elle s'approcha de lui, le sourire aux lèvres en repensant au fait que dans quelques heures, ils seront tous les deux dans un autre pays. C'est toujours aussi souriante qu'elle le salua avec son espagnol qu'elle avait perfectionné en l'attendant : « Hola ! ». Puisque cela n'était pas suffisant pour montrer l'étendue de ses talents, elle poursuivit sur sa lancée : « Como esta ? ».

TENUE ■ Si des tourteaux s'étaient envolés pour Rome, Kô avait planifié un tout autre voyage. Le Mexique. Il était de retour au Japon depuis moins d'un an mais son pays lui manquait... Son pays, concrètement, c'était le Japon. Il savait qu'il n'avait passé que deux ans de sa vie au Mexique ? Détail. En tout cas, ça faisait tellement longtemps et il avait l'impression de tellement souler les gens avec ce pays qui n'intéressait personne que s'y rendre était un véritable plaisir. Il avait prévenu ses amis là-bas de son retour pour quelques jours et il avait même écrit une lettre à Lola, en espérant qu'elle la reçoive avant son arrivée. Et qu'elle soit encore en vie, surtout. Elle était un peu malade quand il était parti, et c'était une dame un peu âgé.

À part ses colocataires et Yue, il n'avait prévenu personne de cette soudaine expédition au bout du monde. Enfin si, pour garder Umberto Pépito, il était allé sonné chez les trois frères Coréens qui vivaient deux étages en dessous. Les deux aînés partaient pour la Corée mais le plus jeune avait accepté de s'occuper du chien jusqu'à son retour. Une fois rassuré pour son enfant, ou son frère, plutôt, il avait minutieusement préparé le voyage, s'assurant mille fois d'avoir ses papiers, que ses affaires étaient bien en ordre. Après une énième vérification, il quitta son appartement, fonçant tout droit à l'aéroport où il allait retrouver Haruno.

Kamiya Haruno, sa kohai au début, il ne saurait trop dire comment il s'était mis à la considérer comme une amie. Il la trouvait mignonne, gentille, elle avait le petit côté innocent de Yue avec la folie en moins. Et la bêtise aussi. Mais là était une autre histoire. Rien ni personne n'égalait l'imperfection imparfaite de sa ''meilleure amie'' d'enfance. Apercevant la jeune Kamiya, il sourit avec joie, s'approchant d'elle.

« Hola Haru-chan~ ! » Il rit un peu en l'entendant parler espagnole, hochant la tête. « Estoy muy bien y tu ? Tu es prête pour l'avion ? »

En discutant un peu, il lui avait parlé du Mexique, de ses années là-bas et elle avait eu l'air intéressé. Quand il lui avait confié vouloir y retourner, Haruno avait eu envie d'y aller avec lui, rien de plus compliqué que ça. Et il était ravi de pouvoir partager ça avec quelqu'un. Voyager seul, ce n'est pas forcément amusant.

« On va ramener nos bagages ? L'avion nous attendra pas. »

Il sourit un peu, ramenant les bagages en soute avant d'aller se faire fouiller, comme toujours. On le fouillait toujours. Sa tête naturelle de terroriste. Il se plaisait à croire qu'il avait l'air d'un bad boy. Même s'il ressemblait plus à un chiot mais qu'on le laisse y croire.

TENUE ■ Pour une raison encore inexplicable, Haruno s'était mise en tête que Kô était un mexicain pure souche. De ce fait, elle s'attendait un peu à ce qu'il prenne les rennes pendant ce voyage et qu'il s'occupe un peu de tout. Le fait qu'elle n'est jamais vraiment voyagé auparavant devait également y être pour quelque chose. Comme si ce n'était pas suffisant, elle n'était même pas accompagné de son niichan ; c'était tout nouveau pour elle qui n'allait jamais trop loin sans lui. Elle se demandait si lui aussi trouvait cela bizarre, s'il commençait également à ressentir le vide qu'elle ressentait. Son but n'étant pas de se rendre triste avant même d'avoir mis un pieds dans l'avion, elle remercia intérieurement son ami Kô de l'avoir convié à ce voyage. Après tout, lorsqu'elle l'avait rencontré, jamais elle ne se serait imaginé quitter le pays avec lui pour aller bronzer sur des plages paradisiaques.

Pour sa part, Haruno avait prévenu le maximum de personne de ce voyage. C'était limite si elle n'en avait pas parler au passant qu'elle avait croisé sur le chemin pour se rendre à l'aéroport. Elle ne pouvait s'empêcher d'être tout excitée autant qu'elle était nerveuse. C'était assez étrange comme sensation, mais l'arrivée de Kô balaya finalement toute sa nervosité. Ou plutôt, sa nervosité se convertissa en une autre forme de nervosité : à présent, elle avait peur de ne pas savoir mettre correctement à profit les petits cours d'espagnol qu'elle s'était elle-même donner. Contre toute attente, elle semblait bien se débrouiller -suffisamment pour être compréhensible-, et elle continua sur sa lancée. « Bien, gracias ». Maintenant qu'elle avait épuisé toutes ses ressources en espagnol, elle continua avec sa langue maternelle : « Oui, plus que prête ! ». Comme si cette réponse n'était pas suffisamment enthousiaste, elle se mit à hocher vivement la tête. Elle lâcha un dernier « Allons-y! » dynamique, avant de le suivre.

La petite Kamiya ne connaissait pas vraiment les procédures à suivre, alors elle se contenta de reproduire chaque action de Kô, avec un large sourire sur les lèvres comme si elle accomplissait quelque chose de miraculeux. D'ailleurs, elle se croyait un peu comme dans les films en voyant les gens se faire fouillé avant de pénétrer dans l'avion. Finalement, une fois toutes ses mesures prises, Haruno posa enfin la question qui lui trottait dans la tête depuis un moment. « Le vol va duré longtemps ? On va prendre combien de temps pour arriver là bas ? Il sera quelle heure ? Il y a un décalage horaire, non ? ». Malheureusement pour lui, ce n'était pas qu'une seule question qui trottait dans la tête de la jeune fille.

TENUE ■ Entendre Haruno parler espagnole faisait rire le pseudo Mexicain, plutôt fier de l'entendre pratiquer sa fausse langue. Au moins, elle ne se trompait pas, mais au fond de lui, il n'en tenait pas rigueur à Yue, parce qu'il trouvait ça bizarrement mignon quand elle se trompait. Il sentait bien qu'elle faisait des efforts pour parler espagnole, même si elle tombait à côté, que ce n'était pas la bonne langue, il était heureux de voir qu'elle essayait. Peu importe la façon, il comprenait que ce n'était pas facile de s'y mettre, rien que l'effort lui suffisait. Mais il n'allait pas penser à Yue maintenant, il avait un long vol pour ne penser qu'à elle et à tout ce qu'il voudra faire au Mexique aussi.

Docilement, il suivait les étapes pour enregistrer ses bagages, puis lui-même, vérifiant que la jeune Kamiya le suivait bien et n'était pas trop perdu. Il la trouvait mignonne, à le suivre comme ça, ça se voyait qu'elle ne l'avait jamais fait avant. Il avait un peu l'impression d'avoir emmené sa petite sœur, enfin, la petite sœur qu'il n'avait pas. Il aimait bien, l'idée d'avoir une sœur, mais il devait se calmer avec ça, en entendre parler avec Maiko, ça lui montait un peu à la tête.

« Le vol même normalement un peu plus de douze heures, mais ça passe vite, tu verras. » Non, au secours, ça ne passait pas vite, il se foutait de qui ? Bon, il ne voulait pas lui faire peur. « Faudra juste que tu essaies de dormir un peu ! » Dormir, la solution des meilleurs voyageurs. « Après, on prendra un taxi pour rejoindre le centre ville, puis on avisera sur place ! »

L'organisation, ce n'était pas son fort, il avait souvent un peu trop ma flemme pour ça. Passant les portes, il regarda sur le tableau d'affichage vers quelle porte ils devaient se rendre pour embarquer. Il s'arrêta rapidement pour s'acheter un sandwich et un pour Haruno qu'il lui tendit en souriant.

« Ils y a 15 heures de moins qu'ici. Il est 10 heures ici, au Mexique, on est encore hier, 19 heures ! Ils vivent dans le passé. »

Ahaha, cette blague qui le fera toujours rire. Il en avait marre d'être aussi con. Croquant dans son sandwich, il l'amena jusqu'aux portes, terminant tranquillement sa nourriture avant d'entrer dans l'avion. « Tu préfères être au hublot ? » Si déjà c'était sa première fois, autant lui laisser le choix.

TENUE ■ Pour le coup, il y avait pas mal de similitude entre Kô et Haruto. Tout comme avec son grand frère, elle faisait suffisamment confiance à Kô pour le suivre sans poser de question, et pour s'en servir d'exemple à chaque étapes précédants leur arrivé dans l'avion. Ces petites étapes que la plupart devait trouver un peu ennuyeuse, Haruno y prenait plaisir. Elle se demandait s'il y avait la moindre chose dans ce voyage qu'elle n'apprécierait pas. Question à laquelle elle reçut une réponse bien plus vite que prévu.

« Un peu plus de 12h ? ». Dans un premier temps, elle pensait presque à une blague, mais elle savait aussi que c'était tout à fait possible. D'un autre côté, elle se voyait très mal rester autant de temps assise sagement dans un avion. Elle attendait ce départ depuis hier soir ; ce n'était pas pour ajouter 12h au compteur. « Haaan, c'est long... ». Mais si comme il le disait, ça passait vite, elle décida de lui faire confiance et de ne pas s'en plaindre davantage. Pas beaucoup. « Dormir ? » répéta-t-elle, presque offusquée. Hors de question. Peut-être l'aurait-elle fait si elle avait entreprit ce voyage toute seule, mais elle refusait d'accorder une seule seconde au sommeil s'ils étaient tous les deux. Quant à la suite du programme, elle se contenta d’acquiescer d'un hochement de tête, sans se préoccuper du fait qu'il était un peu flou. Elle plaçait, de toute façon, une confiance aveugle en Kô. C'était son pays, après tout.

Haruno continua de se déplacer au côté de son ami, en levant également la tête sur le tableau d'affichage, comme si elle savait ce qu'elle cherchait. Peut-être prenait-elle un peu trop au sérieux sa technique de "on fait tout comme Kô, et on aura l'air d'être un voyageur expert en la matière". Elle se sentit davantage à son aise lorsqu'ils décidèrent d'acheter quelque chose à manger. Bientôt, d'ici quelques heures, elle serait face à de la nourriture mexicaine et non plus à tous les petits plats qu'on trouvait à emporter dans les aéroports. Pour s'y préparer, elle opta pour un sandwich au poulet agrémenté d'une sauce piquante. Et autant dire qu'elle était fière de ne pas sentir ses yeux pleurés ; ça faisait en quelque sorte d'elle une vraie petite mexicaine.

« S'il est 10h ici, 19h là bas, et qu'on prends 12h pour s'y rendre, il sera 7h du matin là bas ? Donc ça revient à ce qu'on prenne notre petit déjeuner ici, et qu'un fois là bas, on reprenne encore un petit déjeuner. Ouah. » dit-elle en reprenant une bouchée dans son sandwich, tout en cogitant réellement sur la question. Les Mexicains vivaient vraiment dans le passé ? Quoi qu'il en soit, ce n'était pas le moment de se poser ce genre de question. Une fois que Kô eut terminé son sandwich, elle se pressa de terminer le sien pour enfin pénétrer dans l'avion. Sans même répondre à sa question non plus, elle se hâta de coller son visage au hublot, alors même que l'avion n'avait pas décollé et qu'il n'y avait rien d'extraordinaire à voir. Pourtant, elle savait qu'elle allait certainement passé les 12 prochaines heures à regarder à travers cette petite fenêtre.

Après que l'excitation lui soit passé, elle se tourna enfin vers Kô pour s'assurer que cela ne pose pas problème qu'elle ait décidé de prendre place côté hublot. « Ca ne te dérange pas, hein ? » demanda-t-elle poliment, avant de se souvenir de ce qu'elle tenait en main. « Oh, baisse la tête ». Bien qu'elle s'attendait déjà à recevoir un regard interrogateur de sa part, elle attendit patiemment qu'il s'exécute pour lui mettre plus facilement cet objet autour du cou. « Tada ~ » s'exclama-t-elle en souriant avant de s'expliquer. « Comme ça Yue n'aura pas à s'inquiéter que ta tête tombe malencontreusement contre mon épaule pendant que tu dors ». Idée de génie de la part de leur fan numéro 1.

TENUE ■ Dormir, oui. Elle ne voulait pas dormir ? Il la regarda d'un air interrogateur. Tous le monde aimait dormir, pas Haruto ? Ce n'était pas normal de ne pas aimer dormir, c'était une passion commune que les humains partageaient tous. Surtout dans un avion, pendant douze longues heures. Est-ce qu'elle allait le comprendre ? Il fallait qu'elle le comprenne, c'était un bien nécessaire s'ils ne voulaient pas avoir l'air totalement mort en arrivant.

Tentant de suivre le raisonnement de la plus jeune, il hocha plusieurs fois la tête. Oui, ça devait être ça. Prendre deux petits déjeuner. Un rire amusé quitta ses lèvres et il approuvé une fos encore. Voilà, tout à fait ça. Un deuxième petit déjeuner. Kô aimait bien les petits déjeuners alos tant qu'à faire, en prendre deux, ça ne le dérangeait pas. Mordant dans son sandwich, il avala doucement.

« On pourra manger autre chose qu'un petit déjeuner, même si les mexicains sont très bons ! » On parlait de petit-déjeuner encore, bien sûr. S'installant plus confortablement dans son siège, il attendit sagement le décollage.

Mais Haruno semblait avoir une autre idée avant. Un regard interrogateur se posa sur elle et il mit quelques secondes avant de baisser la tête, sentant quelque chose se glisser autour de son cou. Un coussin pour les voyages. Hello Kitty ? Sa remarque le fit rire, un peu trop nerveusement. « Je pense pas qu'elle s'inquiéterait pour ça. » Elle ne devait même pas être dérangé par cette idée et ça faisait un peu trop mal au coeur de Kô que de se dire cela, mais c'était la vérité, il ne pouvait pas se mentir. « Autre avantage, on risque pas d'essayer de me draguer, sauf si y a un pédophile gay quelque part. » Et il espérait que ça ne soit pas le cas. « Merci Haruno-chan. Tu en as un pour toi aussi ? » Pour qu'ils soient un peu assorti. « Ah, ça décolle ! »

S'enfonçant dans son siège, il observa à travers le hublot l'avion qui quittait le sol. Le vol était calme, long, il avait eu le temps de raconter presque toute sa vie à Haruno, d'écouter la sienne, de faire des jeux stupides jusqu'à atterrir à nouveau. Dans son pays, qui lui avait tant manqué. Quittant l'avion, l'air était matinal et frais. « Alors, ça fait quoi d'être au bout du monde ? » Il en était sans doute un peu trop heureux.